Un peu d’histoire :
Les jardins familiaux, appelés autrefois jardins ouvriers, s’inscrivent dans une démarche sociale très forte.
Ils sont gérés par des associations loi 1901 et ont pour but d’améliorer l’ordinaire des personnes modestes.
Les jardins familiaux sont nés en Allemagne au 19ème siècle, leur déclinaison en France a débuté à Saint Etienne. A la fin du 20ème siècle, l’idée est reprise et généralisée par l’Abbé Jules LEMIRE à Hazebrouk dont il devient député et maire qui fonde la ligue Française du Coin de la Terre pour développer les jardins ouvriers.
Rapidement l’idée fait des émules notamment en région parisienne. La demande est croissante, les surfaces mises à disposition ont explosé.
En 1904, la région parisienne ne comptait que 48 jardins ouvriers mais en 1913 on en recensait 1500. C’est en 1942, pendant la 2ème guerre mondiale que le Jardin du Cheminot voit le jour. La jeune SNCF née en 1938 édite un livre intitulé « Le potager familial du cheminot » dont l’objectif est d’inciter les cheminots à utiliser les emprises de la SNCF inoccupées pour créer des jardins potagers. Ce livre donne les clés pour cultiver fruits et légumes dans le but d’améliorer l’ordinaire dans cette période de restrictions dues à la guerre.
En 1945, le mouvement des jardins ouvriers, porté par les actions du Front Populaire notamment, devient un vrai succès avec plus de 250 000 jardins. En 1952 les jardins ouvriers prennent officiellement le nom de jardins familiaux. La loi votée cette année-là inscrit les jardins familiaux dans le cadre législatif du Code Rural.
L'origine du jardin du cheminot
C’est dans une période noir de l’histoire, pendant la guerre en 1942 que l’association est créée. Les motivations qui président à cette création reposent sur la nécessité de subvenir aux besoins alimentaires des familles. Elles s’inscrivent aussi dans des valeurs de fraternité et d’entraide qui caractérisent cette corporation.
Dès le départ, cette association s’est donnée pour vocation d’insuffler à ses adhérents le goût de la nature , le respect de l’environnement, le sens de l’amitié et de la solidarité en créant ses propres centres de jardins familiaux et collectifs.
Jardinot aujourd'hui
D’abord réservé au monde ferroviaire, le jardin du Cheminot s’est ouvert et est devenu JARDINOT en 2005. Cette ouverture a permis de pérenniser l’activité de l’association au vu du déclin des effectifs de cheminots. Par exemple, le site ferroviaire de Narbonne est passé de 1500 il y a 50 ans à moins de 400 aujourd’hui, ce qui explique le dimensionnement de ce centre avec 6 Ha et 230 parcelles et il est encore le plus grand de France. A noter que les terrains appartiennent à l’association au niveau national. Cette association est toujours reconnue et financée par le CCGPF (Comité Central du Groupe Ferroviaire), il s’agit d’un important soutien et il importe que Jardinot compte toujours dans ses membres une proportion de cheminots pour que cette aide perdure.
Au niveau national, jardinot c’est :
26 000 adhérents
1700 bénévoles
800 comités locaux
80 centres de jardins
6 jardins écoles
8 ruchers écoles
Notre association connait un regain d’intérêt car la liste d’attente est longue pour obtenir une parcelle. Les raisons sont multiples pour expliquer ce phénomène, mais l’essentiel des motivations tourne autour de questions de nutrition, d’économies et du lien social qui se cultive dans ce lieu à partir du jardinage. Le partage des savoirs et des savoir-faire se fait naturellement pour les jardiniers amateurs qui ont la volonté de transmettre un patrimoine de connaissances et de pratiques aux générations futures.
Depuis plusieurs années, nous pratiquons un jardinage raisonné en incitant les jardiniers à bannir l’emploi de produits phytosanitaires à partir d’une charte impulsée au plan national par l’association.
Le Centre de Narbonne a multiplié les partenariats avec des associations ou organismes à vocation sociale (IDEAL, ABP, Hôpital de jour, la Maison des Potes etc…) afin de leur permettre de mener leurs propres activités sur notre site. Nous permettons aussi aux écoles de venir visiter le jardin ou même d’aller à leur rencontre pour les initier au jardinage.
Nous nous intéressons depuis des années aux questions d’irrigation en participant avec l’ASA de la Plaine de la Livière aux travaux sur les économies d’eau à réaliser car nous sommes conscients que cette ressource n’est pas inépuisable. C’est ainsi qu’en 5 années nous sommes passés d’un projet à la concrétisation d’une irrigation sous pression qui nous permet d’arroser même en cas de sècheresse tout en préservant la ressource en eau. Que l’on en juge, sur le territoire concerné soit 80 Ha et près de 500 prises d’eau, il fallait avec le système précédent en gravitaire, ouvrir en permanence 3 vannes sur la Robine qui consommaient 100 litres d’eau à la seconde. Aujourd’hui, ce même territoire en consomme moins de 10 litres à la seconde ! Ce résultat justifie les aides financières que nous avons obtenues pour cette réalisation.
Nous pouvons être fiers d’avoir tenu cet engagement pour le bien de la planète.
En conclusion
Ce bref historique sur le Jardin du Cheminot n’a d’autre ambition que de puiser dans l’histoire du mouvement ouvrier, au travers de l’une de ses facettes, les potentialités de celui-ci. En effet, à partir d’un concept plutôt paternaliste des jardins ouvriers que le patronat de l’époque avait favorisé pour lutter contre l’oisiveté voire l’alcoolisme et qui permettait aux ouvriers de continuer à « avoir le goût du travail », nous nous préoccupons aujourd’hui des questions d’environnement et d’avenir de la planète en entretenant notre carré de potager.
Les motivations d’ordre économique ou social qui ont présidé à sa création demeurent mais le Jardin du Cheminot et maintenant Jardinot a su évoluer avec son temps en osant aborder de manière concrète l’écologie, le développement durable, l’échange et la transmission des savoirs et du savoir-faire.
Charge aux générations futures d’enrichir encore cette histoire.
Alain LLOP
Président du Jardin du Cheminot de Narbonne de 2008 à 2021